Les événements s'enchaînent, mais nous ne voulons pas laisser de côté la disparition de Claude Meyer sans s'arrêter un moment pour honorer ce grand homme qui, venant de la lointaine et généreuse Alsace, a su transmettre à la fois l'amour d'Israël et l'amour envers les jeunes qui ont besoin d'une aide spécifique. L'association israélienne Negba est une de ses œuvres, l'objet de sa passion, celle d'être au service de ces jeunes – "pour le sauvetage d'enfants en péril". A la fondation de Negba, il y avait les trois mousquetaires : Claude Meyer, Claude Kadouche, et Jean Bisseliche, et aujourd'hui s'ajoutent de nombreux autres collaborateurs. Longue vie à Negba avec ceux et celles qui s'y donnent "cœur et âme".
Nous disons "au revoir" à cet ami qui nous quitte trop tôt. Claude était un véritable homme – un Mensch (1), comme l'a dit sa fille lors de la cérémonie funéraire à Jérusalem. Les petits-enfants, de beaux jeunes hommes, le vêtement déchiré selon la coutume, ont témoigné en hébreu, et ne pouvaient s'empêcher de sangloter. Déborah, sa secrétaire et amie fidèle, dira : "Claude était un grand homme, de par sa taille mais surtout par son cœur", et parmi ses qualités, sans conteste on peut parler de sa bonne humeur, sa joie de vivre et son travail infatigable en faveur des jeunes en difficulté. Nul doute qu'ils vont beaucoup pleurer sa disparition, comme des enfants perdant leur papa.
Un mémorial pour Daniel Trocmé
L’ambassadeur P. Maisonnave, J.François Guthman, Claude Meyer, et le pasteur Fruhinsholz lors de l’inauguration du Mémorial[/caption]L’ambassadeur P. Maisonnave, J.François Guthman, Claude Meyer, et le pasteur Fruhinsholz lors de l’inauguration du Mémorial[/caption]J'ai plusieurs fois fait la navette avec Claude, pour aller au-delà de Haïfa, au Kibboutz Lohamei hagueta'ot (les combattants du ghetto). Claude disait qu'il voulait absolument, avant la fin de sa vie, réaliser un Mémorial en faveur de Daniel Trocmé (Mémorial pour un Juste), pour marquer le souvenir de ce jeune Protestant, neveu du pasteur André Trocmé, qui avait lié sa vie avec celles des étudiants juifs assassinés. Claude Meyer ne pouvait oublier cette époque terrible du nazisme, ces moments difficiles mais exaltants d'humanité quand des Juifs étaient sauvés par des gens, chrétiens ou non. L'association juive l'OSE était bien sûr impliquée dans ce travail de sauvetage, et il existait des filières organisées par des chrétiens, protestants ou catholiques, qui emmenaient des familles et des enfants juifs se réfugier en Suisse.
Claude a vécu ces choses tout petit, et il avait en lui ce fort sentiment de reconnaissance qu'il voulait exprimer, d'où ce Mémorial de Daniel Trocmé associé à l'OSE, au Kibboutz Lohamei Hegueta'ot. Cependant Claude avait un autre but, celui d'enseigner aux jeunes Israéliens, juifs et arabes qui visitent les musées et notamment ce kibboutz, que la France n'était pas seulement Vichy, qu'elle n'était pas que antisémite, et qu'il y avait dans cette époque de trouble extrême, un véritable sens de l'humain, une vraie entraide, en un mot qu'il y a toujours de l'espoir.
C'est aussi cela que je retiens de Claude, sa ténacité à vouloir voir en l'homme le meilleur de lui – n'est-ce pas là le judaïsme – en montrant aux jeunes générations en Israël qui ne connaissent que des conflits, qu'il y a toujours de l'espoir, que l'on doit continuer de croire en la paix et la réconciliation, et en faisant tout pour y arriver… avec l'aide de Dieu.
Au nom de Shalom Israël, nous faisons part à la famille de Claude Meyer, à Claudine son épouse, de toute notre affection.